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  • Dernière modification de la publication :30 juin 2025

Le village de Koussoucoingou, niché dans les montagnes de l’Atacora au nord-ouest du Bénin, a vibré, ce vendredi 27 juin 2025, au rythme de la tradition et de la mémoire collective. Le Bureau d’Accueil et d’Informations Touristiques (BAIT) de la Route des Tata a accueilli une cérémonie empreinte de symboles : la réception officielle de dix (10) Tata sacrés restaurés dans le cadre du projet «Route des Tata». La cérémonie a rassemblé plusieurs autorités et parties prenantes : le coordonnateur national de l’ONG Eco-Benin, gestionnaire de la destination Route des Tata, un représentant de l’Agence Nationale des Patrimoines Touristiques (ANPT), un émissaire du ministre du tourisme, de la culture et des arts, une représentante de l’Agence Bénin Tourisme, le premier adjoint au Maire de Boukombé, le président de la Commission Nationale Linguistique Ditammari (CNLD), ainsi que des représentants des communautés bénéficiaires et des médias.

Un symbole restauré, une culture préservée

En amont de cette phase pilote de restauration de tata, une étude minutieuse avait permis d’identifier 150 Tata en état de dégradation avancée, et de concevoir un itinéraire technique de restauration respectueux des savoir-faire traditionnels. Dix (10) d’entre eux, tous des Tata sacrés, ont été sélectionnés pour une phase pilote d’intervention, couvrant les communes de Boukombé, Natitingou et Toucountouna. Ces Tata, bien plus que de simples habitations, sont considérés comme des sanctuaires familiaux et culturels, des « musées vivants » incarnant l’âme et l’histoire du peuple Otammari. Derrière ces dix tata restaurés, ce sont des milliers de familles, de récits, de traditions qui retrouvent leur souffle.

« La restauration de ces Tata constitue un acte fort pour notre communauté. Ce sont des lieux où débute la civilisation Otammari. Nous remercions le gouvernement et l’ONG Eco-Benin pour cette initiative qui redonne vie à notre patrimoine », a déclaré avec émotion Justin Natta, président de la CNLD et représentant des bénéficiaires.

Mais cette reconnaissance s’accompagne d’un appel. Car dix (10) Tata restaurés sur 150 sélectionnés en 2024 parmi les 5000 Tata inventoriés en 2017 dans le paysage n’est qu’un premier pas. Le président de la Commission Nationale Linguistique Ditammari a ainsi plaidé pour la poursuite des efforts, afin d’assurer la sauvegarde durable de ce patrimoine unique classé Patrimoine mondial de l’UNESCO au Bénin en 2023.

Prenant la parole au nom de l’Agence Nationale des Patrimoines Touristiques, Monsieur Jean-Marie Angelo Amoussou a rappelé l’importance de cette architecture traditionnelle dans la stratégie de valorisation du patrimoine culturel béninois.

« Le Tata est le symbole de notre culture, de notre histoire et de notre identité. Ces infrastructures restaurées doivent devenir des lieux de mémoire, mais aussi de vie, de rencontres et d’animation culturelle »,

a-t-il souligné, évoquant la nécessité d’aménager des espaces annexes tels que des restaurants servant des plats locaux, des boutiques artisanales ainsi que l’organisation régulière d’évènements culturels pour enrichir l’expérience des visiteurs. Autant d’initiatives susceptibles de générer des retombées économiques pour les communautés.

L’État mise sur le tourisme patrimonial

La cérémonie a aussi été l’occasion pour les autorités de réaffirmer la place centrale du patrimoine culturel dans la politique touristique nationale. Représentant le ministre du tourisme, de la culture et des arts, le directeur du patrimoine culturel, Monsieur Djimmy Djiffa Edah, a réceptionné officiellement les Tata restaurés. Dans son allocution, il a salué les efforts conjoints des différents acteurs du projet et réaffirmé la vision du gouvernement de faire du patrimoine culturel un levier stratégique de développement économique, de création d’emplois et de rayonnement régional et international. Il a également exhorté les populations à entretenir les Tata restaurés et à œuvrer à la préservation du patrimoine matériel et immatériel que le gouvernement du Président Patrice Talon s’emploie à mettre en valeur.

Trois années d’action concrète sur la Route des Tata

Monsieur Gautier Amoussou, coordonnateur national de l’ONG Eco-Benin – structure gestionnaire de la  destination « Route des Tata », a profité de la cérémonie pour dresser un bilan des actions réalisées. Parmi les faits marquants, on note :

  • l’inventaire et la géolocalisation par drone de près de 5000 Tata sur l’ensemble de la zone Otammari ;
  • la documentation détaillée de plus de 1700 Tata, incluant des données architecturales, historiques et sociales ;
  • l’aménagement du bâtiment du BAIT ;
  • la mise en place un plan de marketing et communication avec la création d’une identité visuelle de la destination ;
  • la mise en place de sept circuits touristiques, dont quatre sont déjà validés et mis sur le marché ;
  • la formation des guides de la destination et des artisans (vanniers, potières, flûtistes, artisans locaux de fibre végétales Ybéni, restaurateurs, hébergeurs, propriétaires Tata) ;
  • l’élaboration d’une charte éthique et d’un code de bonne conduite pour encadrer les visites ;
  • l’organisation de trois éditions de la « fête de l’enduit », véritable moment de valorisation des savoir-faire traditionnels en matière de construction ;
  • la création et l’animation d’un portail web pour la promotion des offres touristique de la destination www.routedestata.bj ;
  • l’appui à la gestion du site UNESCO du Koutammakou, notamment à l’occasion du Festival des Arts et Cultures du Tammari (FACTAM 2024).

Pour rappel, l’extension du site Koutammakou côté béninois a été officiellement inscrite au Patrimoine mondial de l’UNESCO en septembre 2023. Une reconnaissance internationale qui conforte les efforts de conservation engagés.

En clôture de la cérémonie, les participants ont été invités à visiter les Tata restaurés, à dialoguer avec les bâtisseurs et à se laisser imprégner par la magie de cette architecture unique. Pour les visiteurs comme pour les communautés locales, cette visite fut bien plus qu’un simple circuit touristique : une plongée dans l’histoire vivante d’un peuple, un lien profond entre passé et futur.

DANIEL ABOKI / ECO-BENIN